21 Fév. 2019 22h43
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Bonjour,
Ce que Titi a dit à propos des harceleurs est très intéressant, et je peux me permettre d’en parler : J’ai moi-même été harceleur.
Mon ‘’parcours’’ de harceleur s’est déroulé de 6ème à la 5ème : Ainsi, lorsque je suis rentré au collège, je me suis lié d’amitié avec quelqu’un. Mais très vite, je me suis fait d’autres amis et ce quelqu’un est vite devenu quelqu’un qui passait au second plan. Mais étant donné qu’il n’avait pas d’autres amis hormis moi, il devenait encombrant à force. Ainsi, pour m’en ‘’débarrasser’’, j’ai décidé de lui en faire baver : Lui dire en face qu’il me dérangeait aurait été plus simple me direz-vous ? Oui, effectivement, mais à l’époque, je m’étais trompé : Je croyais qu’il était plus vaillant de nuire à quelqu’un quotidiennement plutôt que de lui dire sans filtre ce qu’on pensait alors que c’était tout l’inverse.
Au début, le harcelé revenait, mais il s’est vite éloigné. Mais entre le moment où le harcèlement a commencé et le moment où il a arrêté de me suivre, j’avais ‘’pris goût’’ au harcèlement (et mes amis m’encourageaient dans ce sens…) et j’ai continué à le nuire. Au quotidien, ce harcèlement se traduisait par la propagation de rumeurs fausses sur la victime, des insultes… Cependant, je n’ai jamais effectué de sévices physiques sur lui. Mais le harcèlement moral est pire que le harcèlement physique, car il est invisible et la victime se consume de l’intérieur, et comme l’a dit Someday, il n’y a pas de preuves.
Bref, tout ce petit manège a continué jusqu’à un matin de 2012 : C’était un mardi, j’étais en cours de français quand une surveillante m’informe que je suis convoqué dans le bureau du proviseur immédiatement. Interloqué, je me lève de ma chaise, je prends ma convocation et je marche tranquillement jusqu’au bureau du proviseur. Sur le chemin, j’hypothèse tous les scénarii possibles qui pourraient m’amener chez le directeur, et dans ma tête, un revient avec insistance : Et si c’était à cause de ce garçon que j’embête depuis un an ? Cela me venait à l’esprit car la veille, j’avais été particulièrement virulent avec mon souffre-douleur. C’est alors avec la boule au ventre que je m’assois dan la salle d’attente. Le proviseur me fait rentrer au bout de quelques minutes, et dans le bureau, les deux parents et la victime m’épient d’un air grave. Inconsciemment -ou bien tentative naïve d’améliorer mon pitoyable cas-, je fais la bise à la mère et serre la main au père et au fils : Commence alors là le pire quart d’heure de ma vie : Le proviseur qui me hurle dessus, les parents qui énumèrent la (longue) liste de mes méfaits, et moi qui pleure de toutes mes larmes comme un nourrisson en tentant de platement m’excuser… Jamais je n’avais autant été humilié de ma vie… Voilà comment un harceleur tombe… Moi qui me croyais si fort, me voilà qui fond en larme comme un gamin… En sortant du bureau, le proviseur m’avertit directement que mes parents seront prévenus par un coup de téléphone. J’en était presque heureux, car j’aurais été trop honteux d’oser le dire en face… Au final, pour sanction, j’écope simplement d’une lettre d’excuses à rédiger.
Que se passe-t-il après la chute chez un harceleur ? Dans les semaines, voire les mois qui ont suivi, j’ai été envahi d’une rancune terrible envers le plaignant, avec une envie de lui en faire baver encore plus. Mais fort heureusement, les menaces du proviseur étaient d’une force telle que ma haine ne se traduisait désormais que par de simples regards noirs lancés à la victime. Au final, il m’a fallu du temps pour digérer tout ça, mais plus jamais je n’ai harcelé quelqu’un de ma vie. Je suis désormais un repenti convaincu et je suis même passé de l’autre côté de la barrière en allant défendre un ami qui se faisait harceler au lycée.
Au final, qu’est ce qui m’a poussé à harceler un pauvre garçon sans défense ? Au collège, je cherchais à devenir le plus populaire possible, et pour ça, je ne reculais devant rien. Or, le fait de harceler ma victime me permettait de plaire à mes potes et en plus, je prenais du plaisir à le faire car je me sentais puissant. Mais aussi, je pense que le fait de harceler constituait un bouclier à mes propres failles… Aujourd’hui, je hais plus que jamais la personne que j’étais au début de ma scolarité collégienne : Immature, mais qui se croyait déjà grande...
Aussi, un point que je n’ai pas détaillé : Comment la victime a-t-elle fait pour s’en sortir ? J’ai appris durant mon humiliation dans le bureau du proviseur que les choses en étaient arrivées là en raison du fait que le harcelé se confiait tous les soirs à table à ses parents. Ses parents, voyant que mon nom arrivait avec trop d’insistance, ont pris les choses en main. C’est terrible à dire, mais j’ai eu de ‘’la chance’’ que mon souffre-douleur se soit livré, car les choses auraient très bien pu mal tourner derrière, avec les conséquences qu’on imagine…
Finalement, que retenir de cette pitoyable expérience ? Eh bien que le harcèlement est une honte, non pas pour le harcelé mais pour le harceleur lui-même. Ainsi, si vous êtes harcelé, n’hésitez pas à parler, car le harceleur est bien moins fort que vous ne le croyez, et que le harcèlement cache généralement des faiblesses qu’on n’ose pas affronter en face chez celui qui vous harcèle ! Et n’oubliez surtout pas que le personnel de l’établissement que vous fréquentez est là pour vous aider !
Voilà, je vous livre ma propre expérience de ‘’salaud’’. Je pense qu’un témoignage du point de vue du harceleur peut aider à comprendre un peu mieux l’inexcusable…
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